Aider une victime d'agression

Comment défendre une personne agressée ?

La priorité du krav maga est aussi bien d'apprendre comment défendre une personne agressée que comment se défendre soi-même. Pour la majorité d’entre nous, nous n’avons jamais l'intention de nous engager dans une bagarre à coups-de-poing lors d’une fin de soirée entre amis. Mais une chose en ayant conduit à une autre et nous voilà impliqué dans une bagarre violente avec de parfaits étrangers ou nous sommes confronté à la problématique de se défendre et aussi de défendre une personne agressée.

Faire le choix d’apporter son aide pour défendre une personne agressée n’est pas à la portée de tous le monde. Et même si la non-assistance à personne en péril est légiféré, les réactions lors d’une bagarre seront toujours propre à chaque individu. Comment défendre une personne agressée commence indubitablement par la connaissance des conséquences de ses éventuelles actions.

Assistance à personne en danger ou en péril ?

En droit, la notion de péril n'est pas synonyme de danger et est plus restreinte que celle de danger. Toute situation de péril représente une situation de danger, mais toute situation de danger n'est pas forcément une situation de péril. La jurisprudence a précisément défini ce que le péril veut dire. Le péril est un niveau particulier de danger. Et est définit à partir de l'existence simultanée de trois conditions :

  • gravité ;
  • imminence ;
  • constance.

La première des conditions est liée à la notion de gravité des conséquences. Il y a péril quand le risque encouru par la personne est vital ou pourrait laisser des atteintes physiques graves.

La réalité du péril ?

Il convient tout d'abord de préciser que le péril peut provenir d'une origine quelconque (1). Ce péril peut provenir d'une agression, d'une violence, voire si l'état dans lequel se trouve la victime est entièrement dû à son fait ou à sa faute. La réalité du péril suppose, que doit peser sur autrui une menace actuelle d'un dommage qui surviendra plus tard, peu importe que la potentialité crainte ne se réalise pas à l'avenir (2). Il suffit que cette potentialité existe, car le délit de l'article 223-6, alinéa 2 (3) est un délit "formel" qui ne nécessite pas pour être punissable un résultat dommageable à la victime. Ce qui est puni, c'est le fait de se désintéresser du sort malheureux d'autrui, alors qu'on peut toujours tenter une aide, même si les chances de succès sont faibles.

Par contre, il n’y a par jurisprudence, aucune hésitation à porter assistance à autrui. Car, « un vivant doit être secouru dès qu'existe l'apparence d'un péril. » (4).

L’assistance d’une personne agressée

L'assistance due à une personne agressée est un devoir fondamentale. L'assistance est le fait de donner une aide personnelle ou de provoquer l'intervention d'un tiers pour aider une personne se trouvant en danger ou péril. Il ne s’agit pas d’une option, il faut choisir la meilleure forme ou faire le plus rapidement possible pour cumuler les deux. Avertir les autorités ne suffit pas s’il est possible en premier lieu de transporter la victime en lieu ou lui prodiguer les premiers soins (5).


L'altruisme est obligatoire, non l'héroïsme (6). Au vu des textes de loi et des jurisprudences, il est important de caractériser l’altruisme (7) : disposition bienveillante à l'égard des autres, comportement caractérisé par des actes a priori désintéressés, ne procurant pas d'avantages apparents et immédiats à l'individu qui les exécute, mais qui sont bénéfiques à d'autres individus. À partir de 14 mois enfant qui voit une personne laisser tomber un objet s’empresse de l’aider et lui rend spontanément, sans convoiter une récompense (vidéo). Il ne le fera que si la personne se montre triste ou contrariée d’avoir laissé tomber cet objet. (8). Du point de vu génétique, l’homme semble donc être un animal particulièrement altruiste. Pourtant, l’égoïsme dont tant d’humains font preuve aujourd’hui ne fait aucun doute. De sorte qu’il est possible de se demander si ce ne serait pas plutôt cet égoïsme qui serait un « acquis ».

L’intervention physique pour apporter son aide à une victime

Immobiliser ou apporter son aide de manière physique face à un agresseur n’est pas impossible. L’article 73 du Code de Procédure Pénale le définit : dans les cas de crime flagrant ou de délit flagrant puni d'une peine d'emprisonnement, toute personne a qualité pour en appréhender l'auteur et le conduire devant l'officier de police judiciaire le plus proche.

Mais dans les faits, intervenir physiquement pour apporter son aide à une personne agressée est toujours une question de proportion. En effet, le droit français est fondé sur un principe a priori simple, mais lourd de conséquences :

  • un simple citoyen n’a en aucun cas le droit d’intervenir physiquement lui-même ;
  • mais il a le devoir d'intervenir.

Sauf que la rapidité des évènements d'une agression fait :

  • qu'être capable de garder son sang-froid et sa lucidité est très loin d'être accessible à tout un chacun ;
  • que sans savoir, savoir faire ni connaissance, en l'occurrence en krav maga, comment agir ? ;
  • qu'un sentiment d'impuissance et un état de sidération face à la violence empêchent d'agir ;
  • ...

Seules les forces de l’ordre sont habilitées à intervenir physiquement sur l’auteur d’un crime, d’un délit ou d’une infraction pénale.

S’interposer ? Et si je blesse l’agresseur ?

Si je m’interpose et blesse l’agresseur, peut-on m’attaquer en justice ? Tout est toujours question de proportion. La proportion de l’intervention se réfère aux dilemmes de l’article 122-5 du Code de Procédure Pénale qui définit la légitime défense (9).

Conclusion

  • le secours n'est dû que s'il peut être apporté sans risque pour l'intervenant et pour les tiers ;
  • le citoyen doit le secours, mais uniquement celui dont il est capable en fonction de ses capacités physiques ou intellectuelles ;
  • nous sommes n'est pas tenu de porter secours au détriment de notre intégrité corporelle, ni de celle des tiers, même pour sauver une personne en grand péril. Cela doit s'entendre, comme d'une absence de risques sérieux, car toute intervention comporte un risque ;
  • dans les transports publics, tirer la sonnette d’alarme pour faire arrêter le train ou le métro de préférence sur le quai pour éviter la panique et retarder l’arrivée des secours ;
  • après avoir alerté les secours, être témoin et avoir le réflexe d’observer (photos ou vidéos) l’agresseur pour pouvoir en faire un signalement (vêtements, taille, mode opératoire, arme utilisée, direction de la fuite…).

La meilleure intervention : la mobilisation collective

Lutter contre le biais de conformité. Cela désigne la tendance que nous avons parfois à délaisser notre raisonnement intime pour rallier l’avis de la majorité indépendamment du bien-fondé de celui-ci (10). Il est démontré scientifiquement et depuis longtemps que lors d’une scène d’agression, les témoins de la scène n’osent pas agir par peur des répercussions. Tous les humains, à différents degrés ont tendance à se conformer au comportement de la masse et il devient difficile d’agir différemment du groupe. « Si personne ne fait rien, je ne fais rien. » Simplement en levant la voix pour mobiliser la foule à intervenir, il est possible d’accélérer le processus d’intervention de celle-ci afin de provoquer une effet de masse dirigé vers l’agresseur.

Sources

(1) Crim.31 mai 1949, JCP 1949. II. 4945, note Magnol
http://www.unpeudedroit.fr/droit-penal/edito-agression-sexuelle-dans-le-metro-lillois-retour-sur-les-consequences-penales-dune-indifference-generalisee/
(2)  Cass. Crim. , 21 janv.1954 : JCP 1954 éd.G, II, 8050, note, P.-A. Pageaud
(3) Article 223-6. Quiconque pouvant empêcher par son action immédiate, sans risque pour lui ou pour les tiers, soit un crime, soit un délit contre l'intégrité corporelle de la personne s'abstient volontairement de le faire est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. Sera puni des mêmes peines quiconque s'abstient volontairement de porter à une personne en péril l'assistance que, sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours… https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006070719&idArticle=LEGIARTI000006417779
(4) Montpellier, 17 fév. 1953, JCP 1953. II. 7499
(5) Article 223-7. Quiconque s'abstient volontairement de prendre ou de provoquer les mesures permettant, sans risque pour lui ou pour les tiers, de combattre un sinistre de nature à créer un danger pour la sécurité des personnes est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.
(6)  Trib. corr. Mont-de-Marsan, 21 janv. 1959. : JCP 1959, éd. G, II, 11086
(7) http://www.cnrtl.fr/definition/altruisme
(8) Felix Warneken, Tomasello, M. (2009). Why we cooperate. The MIT Press.
(9) Article 122-5. N'est pas pénalement responsable la personne qui, devant une atteinte injustifiée envers elle-même ou autrui, accomplit, dans le même temps, un acte commandé par la nécessité de la légitime défense d'elle-même ou d'autrui, sauf s'il y a disproportion entre les moyens de défense employés et la gravité de l'atteinte. N'est pas pénalement responsable la personne qui, pour interrompre l'exécution d'un crime ou d'un délit contre un bien, accomplit un acte de défense, autre qu'un homicide volontaire, lorsque cet acte est strictement nécessaire au but poursuivi dès lors que les moyens employés sont proportionnés à la gravité de l'infraction.
(10) https://www.icem-pedagogie-freinet.org/node/33964

07/03/2019


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